Réflexions cliniques sur l’approche des signifiants corporels archaïques dès le début de la cure

Mes patientes anorexiques et/ou boulimiques m’ont permis de discriminer des comportements et des angoisses de mort et d’effondrement fondés sur des fantasmes inconscients reliés à des signifiants corporels archaïques appartenant à certaines phases spécifiques du développement pulsionnel, psychosensoriel, psychomoteur et psycho-émotionnel du fœtus au cours des trois trimestres. Comportements et fantasmes présents chez toutes mes patientes nées avant terme. En effet, j’ai pu repérer chez elles la récurrence des mêmes sensations douloureuses (« je me sens morte et oubliée quelque part », tel un jumeau homozygote « évanescent » mort et disparu au sixième mois), les mêmes lapsus confondant les trois générations comme « ma mère était morte bien avant ma naissance », les mêmes gestes compulsifs et en miroir, et la même succession de couleurs d’habits et de sacs au cours de l’analyse. Mais, surtout, j’ai pu observer que leur comportement alimentaire correspondait à celui des femmes enceintes et à celui du fœtus vis-à-vis du liquide amniotique au cours des trois trimestres, et qu’elles avaient la même succession de cauchemars récurrents que les femmes enceintes mettant en scène la mort, le meurtre et la disparition d’un enfant au début de grossesse et à la fin des trois trimestres.
Ces comportements et ces cauchemars m’ont permis d’avancer l’idée de l’existence d’une mémoire perceptive spécifique des humains qui permettrait la transmission inconsciente de l’expérience vécue durant la gestation par les mères et les fœtus sur trois générations à travers les rêves et surtout les cauchemars qui mettent en scène les fantasmes maternels originaires « se séparer, accoucher et naître, c’est mourir et tuer l’enfant ». Ces fantasmes se fonderaient sur une angoisse de mort et sur l’effroi, d’origine archaïque, ressentis inconsciemment par toutes les femmes au cours des traumatismes endogènes spécifiques de l’état de gestation. Ils seraient provoqués par les brusques transformations hormonales et physiologiques qui surgissent dès la fécondation et à certaines phases critiques du développement du fœtus, lorsqu’il devient plus autonome. Ces étapes seraient aussi marquées pour le fœtus par des perceptions terrifiantes « de chute et d’effondrement dans le vide sidéral », présentes dans les cauchemars, reliées à la construction de son système vestibulaire.
C’est sur ces points que je voudrais travailler cette année : comment aborder assez rapidement dans les cures les fantasmes maternels originaires fondés sur des signifiants corporels archaïques terrifiants qui rendent toute séparation et subjectivation impossible. Nous retrouvons dans cet approche tous les apports théoriques élaborés depuis Freud sur le traumatisme et les signifiants corporels archaïques (Rank, Ferenczi, Winnicott, Bion, McDougall, Pankow, Lacan, etc.) et surtout l’apport de Françoise Dolto.

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